1936 CHEMIN DE CROIX de LA BAULE
Titre : CHEMIN DE CROIX de LA BAULE
Édition : Oeuvre monumentale
Auteur : Paroisse Notre Dame de la Baule (44)
Illustrateur : Xavier DE LANGLAIS
Année de réalisation : 1936
Dimensions : 70*50 pour chaque station, elles sont présentées 2 par 2 avec en leur centre une représentation symbolique des objets de la passion réalisés par Xavier Haas
Les stations I et XIV sont placées dans une arcade et sont plus grandes
Nombre de stations : 14
Description : Chemin de croix réalisé par Xavier de Langlais : entre décembre 1935 et mars 1936 sur commande de L’abbé François Chochon pour cette nouvelle église paroissiale (construite de 1931 à 1935 )
Il s’inscrit parfaitement dans la lignée du mouvement du renouveau de l’art breton des “Seiz Breur”. Mais James Bouillé et Xavier de Langlais fondent, en 1929, « l’Atelier Breton d’Art Chrétien » ou en breton « An Droellenn » la spirale qui aura pour spécificité le renouvellement de l’art religieux en Bretagne : bien évidemment l’architecture, la peinture et la gravure mais aussi la sculpture, les vêtements sacerdotaux, le mobilier d’église, l’orfèvrerie, etc.; Il est dit dans la revue, « L’artisan liturgique », en parlant de James Bouillé « le grand audacieux qui en Bretagne, a eu le courage de rompre avec la routine. »
L’église Notre Dame de la Baule se situe tout à fait dans l’esprit de renouveau architectural qui souffle au moment de sa construction, au début des années 30. Elle est l’œuvre d’un architecte Nantais, Monsieur J.Bougoin. Ce monument est un exemple intéressant de recherche. Certes, son style n’est pas révolutionnaire, je dirai même que c’est une sorte de transition entre le néo-gothique et l’art novateur d’un Dom Bello ou d’un James Bouillé. L’architecte a su cependant marier de façon harmonieuse, techniques nouvelles et choix des matériaux.
Histoire de cette commande : en octobre 1935, Xavier de Langlais organise à Nantes, galerie Mignon-Massart, une exposition d’art religieux. Il y eut beaucoup d’admirateurs, mais peu d’acheteurs. Cependant, parmi les visiteurs anonymes, deux d’entre eux ont repéré son œuvre, mais il ne le sait pas encore : l’Abbé Chochon, recteur de l’église Notre Dame de La Baule et son architecte, Monsieur J.Bougoin. Quelques jours après la fermeture de l’exposition, il est convoqué à Nantes par l’architecte, l’entretien est cordial, il lui est demandé de présenter un projet très rapidement, le recteur de Notre Dame de La Baule est pressé, le chemin de croix devant être en place pour le prochain Carême… Peu de jours après, un nouveau rendez-vous est fixé, cette fois en présence de l’abbé Chochon ; mon père ayant eu le temps d’ébaucher quelques esquisses. A la grande surprise de celui-ci, l’affaire est conclue le soir même ! Il y avait cependant d’autres candidats, mais il faut croire, que ce que notre curé avait vu à l’exposition de Nantes, l’avait convaincu de la justesse de son choix…
L’artiste peintre Xavier Haas a également participé à la réalisation de ce chemin de croix. C’est à lui que l’on doit les six panneaux qui relient les stations de Xavier de Langlais, deux par deux. Ils représentent les objets de la crucifixion : la couronne d’épine, la lance, l‘éponge qui a servi à étancher la soif du Christ, le Marteau et le fouet.
Nombre d’illustration(s) : 14
Code GW : OM-CCB-EO
Illustrations associée(s) :
Annexe(s) :
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Lettre de Xavier de Langlais à son ami Xavier Haas : “j’ai pensé à une chose : mon chemin de croix doit être livré d’ici le carême, 14 compositions en 80 jours, moins d’une semaine pour chacune. En outre, pour relier les stations il y a 6 panneaux décoratifs à peindre ; si je vois que je n’y arrive pas dans ce délai, je te demanderai peut-être de venir me donner un coup de main, je te paierai le voyage et un peu plus aussi. Si tu n’avais rien à faire à Paris, cela t’irais-il ? ». Marché conclu, Xavier Haas arrive à Cohanno le 6 février 1936 pour exécuter les 6 panneaux décoratifs qui vont relier les stations entre elles.
Sur un sujet aussi connu que la passion du Christ, j’ai choisi d’être le plus discret possible en laissant à mon père Xavier de Langlais, le soin de nous indiquer les problèmes qu’il a pu rencontrer lors de la réalisation de cette œuvre. Comme on pourra le remarquer, il s’étend davantage sur les problèmes techniques qui le tracassent plus que la composition elle-même. Il connaît son sujet et sait de quelle manière il va le traiter. Par contre, ayant déjà rencontré des problèmes techniques, il sait que c’est sur ce point qu’il doit porter toute son attention. En outre La Baule se trouvant en bordure de mer, il doit se méfier du salpêtre. Dès le début de sa carrière, il a eu le souci d’assurer la pérennité de son œuvre. Il pardonnait difficilement à ses confrères peintres plus âgés que lui, de ne pas se soucier de la qualité du support sur lequel ils réalisaient leurs œuvres, ni de la qualité des produits qu’ils utilisaient pour les réaliser. C’est incontestablement ce constat qui, quelques années plus tard, l’a poussé à écrire son livre sur la technique de la peinture à l’huile.
Chaque station a fait l’objet d’une étude préalable poussée, rien n’a été laissé au hasard, ni pour la dimension des châssis, ni pour la composition de chaque station, mon père s’est appuyé sur le nombre d’or dont il était un fervent adepte, particulièrement à cette époque. A ce sujet, il a écrit un livre en langue bretonne traitant de ce sujet : Ene en linennou, en français, l’âme des lignes.
La toile qui a servi a été scrupuleusement étudiée, son choix s’arrêtera sur un Gros grain.
La peinture utilisée provient de la maison Le Franc, peinture à l’huile mate dont il chante les louanges, mais il en déchantera vite, sa brillance ne correspond pas tout à fait à ce qu’il attendait. Comme on va le voir, le fabricant n’est pas en cause, c’est l’éclairage de l’église…
En cours d’exécution, muni de deux stations déjà terminées, il se rend à l’église de La Baule, il veut, avant d’avoir terminé son travail se donner une idée de l’effet obtenu sur place. C’est la catastrophe, voici ce qu’il en dit :
« Je ne pouvais craindre éclairage plus néfaste : Jour de face avec miroitement. Là où l’huile est mâte, elle semble lourde, là où elle garderait plus de transparence, elle brille. Un seul remède, pencher un peu l’encadrement. Mis à bas, l’impression de décoration murale disparaît.(P 5) » Comme on peut le voir, c’est ce qu’il fit, les peintures sont toute inclinées vers le bas au lieu d’être plaquées sur le mur, de façon classique.
Sa conclusion est sans appel : « Je ne peindrai plus à l’huile mâte, du moins pour une église, l’éclairage est généralement trop dispersé. L’huile qu’elle soit mâte ou brillante ne supporte vraiment qu’un jour frisant. Sous tout autre éclairage elle devient sourde ou miroite, et tout est désaccordé. Malgré mes déboires, essaierais-je encore autre chose par moi-même ? Il serait temps que je me fixe. Hier repris une station. Aujourd’hui, ébauché la 13ème station. Avec la décourageante perspective que ce sera plus mal là-bas qu’ici. »
15 Janvier 1935 – Dans son journal, Xavier de Langlais note : « J’ai repris l’ensemble de mes sept premières stations. Lundi, j’ai reçu la visite du curé de La Baule (l’abbé Chochon) et de Monsieur Bougoin, l’architecte. Ce dernier m’a reproché avec raison, une certaine mollesse dans les drapés. »
En cours d’exécution de ce chemin de croix, mon père à lu, au hasard de ses lectures, un article sur le Saint Suaire ; voici ce qu’il en dit : « J’ai lu ce soir une plaquette du Docteur Pierre Barbet sur le Saint Suaire. Il y a vraiment toutes chances pour que le Suaire de Turin ait enveloppé réellement le corps du Christ. Il n’est dans tous les cas, plus contesté qu’il ait enveloppé le cadavre d’un crucifié et quel supplicié, sinon le fils de Dieu pourrait avoir pareille Majesté dans la mort ? »
Par la suite, Xavier de Langlais fera encore le chemin de croix de Lannion sur toile, mais les conditions d’éclairage sont différentes. Instruit par l’expérience, il adopte une autre technique, utilisant une peinture beaucoup plus en relief et moins brillante. Sur le plan artistique, c’est ce dernier chemin de croix que je préfère. Ce dernier chemin de croix est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques ainsi que la chapelle de Lannion.
Pour les deux derniers, il utilisera d’autres techniques : la fresque à La Richardais, ce qui évitera toute brillance désagréable et la céramique pour l’église de Ploemeur dans le Morbihan.
Critique artistique – Ouest-Eclair du 5 mars 1935 : « Une des difficultés de composition était de pouvoir inscrire chaque station dans une surface relativement petite. Xavier de Langlais en conservant des personnages grandeur nature ; a « meublé » ses panneaux d’une façon très originale et hardie, en présentant à mi-corps ou en suggérant par un visage ou un bras toute une expression du mouvement. »
Gaëtan de Langlais, Cohanno le 15 juin 2004
Pour le congrès de l’Association Bretonne 2004, de Pornic.
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