1938 An Tamall / Le reproche – pièce de théâtre
Titre : An Tamall / Le reproche – pièce de théâtre (TAM)
Édition : Non Publié (NP)
Auteur : Xavier de Langlais
Illustrateur : Non
Code XL : NP-NP-TAM-EO
Type de publication : pièce de théâtre
Type d’édition : édition originale (EO)
Langue : Breton
Année de représentation : 1938 au Bleun Brug de Lannion
Synopsis :
An Tamall (le reproche) est une pièce de théâtre que Xavier de Langlais finit d’écrire en juillet 1938.
Elle est jouée au Bleun-Brug de Lannion à deux reprises, les 4 et 5 septembre 1938. ( Feiz-ha-Breiz, 10/1938, p.219) Cette pièce est tout à fait particulière car deux langues s’entremêlent dans les dialogues : le français et le breton. Ce choix est directement au service du thème développé : l’apprentissage et la transmission de la langue bretonne.
En effet, l’histoire est celle d’une famille dont la mère, bretonnante, décide de ne pas transmettre sa langue à ses enfants. Comme le résume Pêr Denez, « Langleiz voulait donner une image du passage, dans une famille, du breton au français. » Et cette image est rude. La fille Anna tout comme le fils Yann reprochent à leur mère deux éléments différents. L’une lui reproche le fait
de ne pas avoir fait d’études comme son frère et souhaite se sortir de sa condition et ne pas se marier à un paysan, Pabu, comme sa mère le voulait pour faire perdurer la ferme familiale.
L’autre lui reproche le fait de ne pas lui avoir transmis la langue et de l’avoir envoyé très tôt en études alors que lui, souhaitait rester à la ferme.
La fille Anna s’exprime en breton et en français. Le fils Yann s’exprime exclusivement en français puisqu’il est parti tôt de la maison. La mère utilise les deux langues. C’est ce jeu de langue qui met la thématique en relief et qui vient asseoir l’opinion de l’auteur. De plus, cette pièce en sept tableaux est précédée par un prologue que Xavier de Langlais a écrit et qui a sans doute été dit lors de la première. Il y fait part de l’anormalité de la situation de la langue bretonne dans l’enseignement et l’inégalité de traitement entre certaines langues étrangères enseignées et le breton encore laissé à la porte des écoles de la République. Il donne aussi les arguments qui sont développés dans la campagne d’Ar Brezoneg er Skol, campagne dont fait partie Xavier
de Langlais depuis pratiquement ses débuts en 1934. Il y inclut également son expérience personnelle :
« L’auteur de cette pièce a appris le breton à vingt ans, si certaines vérités vous
paraissent dures, n’oubliez pas qu’il est de ceux qui peuvent vous dire : Apprenez à vos enfants à parler votre langue afin qu’ils ne vous reprochent pas plus tard de leur avoir voler [sic] leur héritage. »
Et on y retrouve l’énergie et le combat qui lui est cher, celui de sauver la langue bretonne, de lui redonner sa place dans la vie quotidienne en Bretagne « Or la langue que vous parlez ne vous appartient pas, cette langue là est la langue de votre race. Vous l’avez apprise de vos parents vous devez l’apprendre à votre tour à vos enfants et vous n’avez pas le droit de ne pas le faire. À chaque peuple sa langue, un peuple qui perd sa langue perd son âme, il donne sa démission en tant que peuple. Ce qui est vrai pour les autres peuples l’est aussi pour le peuple breton.
C’est votre devoir et c’est l’intérêt de vos enfants et des enfants de vos enfants. Le jour n’est pas loin où la langue bretonne sera enseignée dans les écoles de Bretagne, où les véritables ignorants seront ceux qui ne sauront pas le breton ou ceux qui voudront occuper un Poste en Bretagne devront savoir la langue bretonne, votre langue. »
Puis il conclut en mettant en avant le titre de sa pièce et sa signification :
« Puissent vos enfants ne pas avoir à vous faire le reproche qu’adresse à sa mère le héros “d’an Tamall” :
“Vous m’avez fait instruire jusqu’à vingt ans… et je peux tout maintenant… tout
sauf vous comprendre ! Tout sauf être chez moi ici, en Bretagne.” Savez-vous ce que vous avez fait de moi ? Vous avez fait de moi un étranger ! ” »
Cela résonne forcément avec le vécu de Xavier de Langlais, lui qui a appris la langue à vingt ans à partir de 1926 lorsqu’il s’est rendu à Paris pour ses études. C’est ce qu’il écrit dans son journal ( Journal XL 17/07/1938) :
« N’eo ket deuet ganin ken brao hag am befe karet… Ha koulskoude, war gredan, eul labour sord se a c’hell ober berz ! Skrivet eo bet d’an nebeuta gant kred. Gouzanvet am eus ar pez a zisklerian. Ar re o deus gouzañvet en o c’halon gant an hevelep kleñved a vo frommet war gredan gant an oberenn se »
« Je ne l’ai pas réussie autant que je le souhaitais… Et cependant, je crois qu’un tel travail peut avoir du succès !
Il a été au moins écrit avec conviction. J’ai enduré ce que je déclare. Ceux qui ont enduré dans le cœur la même maladie seront, je crois, émus par cette œuvre. »
C’est d’ailleurs lui qui va tenir le rôle de Yann (Journal XL 17/07/1938)
.
Cette pièce est restée inédite. Pour quelles raisons ? Sans doute en partie du fait qu’il ne soit pas totalement satisfait de sa production comme il le dit dans son journal. Selon Pêr Denez, c’était pourtant dans ses intentions.
Il est par ailleurs difficile de savoir exactement la teneur de l’ambiance dans la salle lors des représentations. Pour Xavier de Langlais, l’accueil reste timide :
« Pas un applaudissement jusqu’à la fin, et encore le rideau baissé,
applaudissements peu nourris ! On m’a certifié cependant que ce silence était plutôt fait de surprise et d’attention. Il paraît d’après certaines réflexions entendues que la pièce portait bien pourtant. » Journal XL 13/09/1938
Selon Pêr Denez, la pièce « fut mal accueillie ». En effet, une critique parue dans Ouest-Eclair le 7 septembre 1938, après avoir rappelé la critique élogieuse de An diou zremm parue en 1933 , se montre plus que sceptique sur la qualité de la pièce de part notamment la thèse qu’elle soutient :
« C’est que An Diou Zrem était un cas accidentel, évidemment, mais un cas bien choisi, mettant en jeu les sentiments profonds et éternels du cœur. Dans An Tamall, ces sentiments aussi se trouvaient en jeu et ils auraient pu donner lieu à une présentation graduée, nuancée, prenante, qui aurait sûrement alors déclenché et retenu l’émotion. Oui, mais il y avait, hélas ! la thèse à soutenir, et immédiatement, à priori, l’action s’est embarquée dans l’arbitraire avec ce dialogue bilingue, dont une accentuation à tendance ridiculisante, pour la partie française, ralentissait et alourdissait encore l’effet… »
Il n’en reste pas moins que cette pièce nous montre un Xavier de Langlais défendant au plus haut point la transmission familiale de la langue bretonne. Il conclut d’ailleurs dans son journal le 13 septembre 1938 : « Quand même elle n’aurait servi à éclairer qu’un seul, je ne regretterai pas de l’avoir écrite. Les critiques des plumitifs à gage me touchent peu ! Vraiment peu. »
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